ALCOOL ET SANTE ENFIN RECONCILIES ?

La loi Evin du 10 janvier 1991 relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme a 20 ans. Mais ses dispositions n’en restent pas moins d’actualités.

Pour mémoire, on rappellera les articles L 3323-2 et 3323-3 (voir plus bas).

La Loi Evin s’applique aux marques !

En matière de propriété industrielle, la Loi Evin s’applique toujours aujourd’hui, témoin une décision récente ayant opposé Jas Hennessy, filiale du Groupe LVMH à la société de cosmétique Dyptique.

alcool

Cette dernière reprochait à la filiale de LVMH d’avoir déposé postérieurement à elle une marque Dyptique pour des produits d’alcool, et par conséquent, de lui faire encourir le risque de voir sa propre publicité être interdite au motif qu’elle ferait une publicité indirecte à un produit d’alcool.

Cette décision n’est pas isolée puisque le TGI de Paris avait déjà statué dans un sens identique le 10 octobre 2003 dans une affaire où les Parfumeries Fragonard avait pu obtenir l’annulation d’une marque postérieure FRAGONARD déposée pour du Cognac.

Pourquoi la Loi Evin ?

La justification de ces dispositions est bien évidemment de limiter la consommation d’alcool « cause indirecte de 45 000 décès par an » comme l’indique le site Doctissimo

http://www.doctissimo.fr/html/dossiers/alcool/alcool.htm

et qui demande si l’alcool ne serait pas pire que le crack ou l’héroïne.

La crainte de l’alcool n’est pas nouvelle comme le montre cette affiche :

Une étude scientifique qui montre que l’alcool peut être bon pour la santé !!

C’est là où le dernier article de Point vient jeter la confusion :

Le Point a relaté dernièrement une étude récente sur le lien entre alcool et santé :

http://www.lepoint.fr/invites-du-point/didier_raoult/pasteur-le-vin-et-la-sante-21-12-2011-1411006_445.php

Nous tenons à disposition des lecteurs l’article scientifique à l’origine de cette information et qui semble montrer qu’il y a eu un vrai travail de recherche et d’analyse des informations recueillies.

Il s’agit d’un travail d’une équipe italienne (Simona Costanzo • Augusto Di Castelnuovo • Maria Benedetta Donati • Licia Iacoviello • Giovanni de Gaetano) intitulée « Wine, beer or spirit drinking in relation to fatal and non-fatal cardiovascular events: a meta-analysis” et publiée dans le 11 novembre 2011 par Springer Science+Business Media

Conclusion :

Si des études scientifiques indépendantes, objectives et sérieusement documentées montrent, chiffres à l’appui, que la consommation de vin a, dans certaines conditions, un effet favorable sur la santé, est-il encore possible que la Loi Evin sévisse dans toute son exigence et, particulièrement, en ce qui concerne le droit des marques ?

Le monde du vin devrait alors bénéficier de la liberté de choisir un nom pour leur produit en respectant, bien sûr, les règles du droit commun (disponibilité, distinctivité, non atteinte à l’ordre et la morale, etc.) mais aussi en bénéficiant des règles du droit commun (notamment le principe de spécialité propre au droit des marques et qui interdit à titulaire de marque d’agir au-delà des activités pour les quelles il a un droit).

Voilà un débat qui ne fait que commencer…

Article L3323-2

La propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques dont la fabrication et la vente ne sont pas interdites sont autorisées exclusivement :
1) Dans la presse écrite à l’exclusion des publications destinées à la jeunesse, définies au premier alinéa de l’article 1er de la loi nº 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse ;
2) Par voie de radiodiffusion sonore pour les catégories de radios et dans les tranches horaires déterminées par décret en Conseil d’Etat ;
3) Sous forme d’affiches et d’enseignes ; sous forme d’affichettes et d’objets à l’intérieur des lieux de vente à caractère spécialisé, dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat ;
4) Sous forme d’envoi par les producteurs, les fabricants, les importateurs, les négociants, les concessionnaires ou les entrepositaires, de messages, de circulaires commerciales, de catalogues et de brochures, dès lors que ces documents ne comportent que les mentions prévues à l’article L. 3323-4 et les conditions de vente des produits qu’ils proposent ;
5) Par inscription sur les véhicules utilisés pour les opérations normales de livraison des boissons, dès lors que cette inscription ne comporte que la désignation des produits ainsi que le nom et l’adresse du fabricant, des agents ou dépositaires, à l’exclusion de toute autre indication ;
6) En faveur des fêtes et foires traditionnelles consacrées à des boissons alcooliques locales et à l’intérieur de celles-ci, dans des conditions définies par décret ;
7) En faveur des musées, universités, confréries ou stages d’initiation oenologique à caractère traditionnel ainsi qu’en faveur de présentations et de dégustations, dans des conditions définies par décret ;
8) Sous forme d’offre, à titre gratuit ou onéreux, d’objets strictement réservés à la consommation de boissons contenant de l’alcool, marqués à leurs noms, par les producteurs et les fabricants de ces boissons, à l’occasion de la vente directe de leurs produits aux consommateurs et aux distributeurs ou à l’occasion de la visite touristique des lieux de fabrication.
Toute opération de parrainage est interdite lorsqu’elle a pour objet ou pour effet la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques.

Article L3323-3

Est considérée comme propagande ou publicité indirecte la propagande ou publicité en faveur d’un organisme, d’un service, d’une activité, d’un produit ou d’un article autre qu’une boisson alcoolique qui, par son graphisme, sa présentation, l’utilisation d’une dénomination, d’une marque, d’un emblème publicitaire ou d’un autre signe distinctif, rappelle une boisson alcoolique.
Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables à la propagande ou à la publicité en faveur d’un produit autre qu’une boisson alcoolique qui a été mis sur le marché avant le 1er janvier 1990 par une entreprise juridiquement ou financièrement distincte de toute entreprise qui fabrique, importe ou commercialise une boisson alcoolique.

Anne-Laure SELLIER – Juriste PI – Inlex IP Expertise

Laisser un commentaire