En créant la marque de certification de l’Union européenne, le Règlement UE 2015/2424 entré en vigueur l’hiver dernier, enrichit considérablement le système européen de protection des marques. Pour rappel, l’ancien Règlement 207/2009 prévoyait des dispositions spécifiques aux marques communautaires collectives mais demeurait silencieux quant à une éventuelle fonction de certification de celles-ci. Si nombre d’Etats membres n’opéraient pas de réelle distinction entre les deux types de marques collectives, tel n’était pas le cas de la France qui a intégré depuis 1991 la marque collective de certification au sein de son arsenal juridique.
Cette absence de reconnaissance spécifique de la marque de certification est donc bientôt révolue puisque dès le 1er octobre 2017, tout ressortissant d’un Etat membre de l’Union Européenne, qui satisfait aux conditions prévues dans le Règlement, pourra déposer une marque de certification de l’Union européenne. Pour autant, la directive 2015/2436 issue du « Paquet Marque » laisse les Etats Membres libres de prévoir l’enregistrement d’une marque de certification au niveau national, ce qui laisse supposer qu’une marque de certification européenne puisse être déposée dans un pays qui ne prévoit pas lui-même l’enregistrement d’une telle marque.
Un ensemble de règles spécifiques à la marque de certification est donc instauré mais fort est de constater que ce régime juridique est peu ou prou le même que celui qui était déjà prévu pour la marque communautaire collective. Ceci est d’autant plus regrettable que ces deux marques n’ont absolument pas la même fonction. En effet, la marque de certification de l’Union européenne a pour fonction principale de garantir aux consommateurs, dans un objectif d’intérêt général, la qualité des produits ou des services pour lesquels « la matière, le mode de fabrication des produits ou de prestation des services, la qualité, la précision ou d’autres caractéristiques, à l’exception de la provenance géographique, sont certifiés par le titulaire par rapport aux produits ou services qui ne bénéficient pas d’une telle certification ». Alors que la marque collective a simplement pour fonction d’indiquer au consommateur l’origine des produits ou services proposés par un groupement promu via cette marque, dans l’intérêt collectif du groupe.
A titre d’exemple, le célèbre label WOOLMARK certifie que les produits sur lesquels il est apposé sont en pure laine vierge :
Plus patriote, la marque Label Rouge certifie que des denrées alimentaires ou des produits agricoles non alimentaires et non transformés possèdent des caractéristiques spécifiques établissant un niveau de qualité supérieur :
La possibilité de déposer une marque de certification est soumise à un encadrement précis. Toute personne physique ou morale, y compris les institutions, autorités et organismes de droit public, peut déposer une marque de certification de l’Union Européenne. Le Règlement prévoit une exigence d’indépendance du déposant par rapport au secteur d’activités concerné par la certification dans le but d’assurer l’effectivité de la fonction de garantie. Le déposant devra présenter un règlement d’usage de la marque dans un délai de deux mois à compter de la date de dépôt, il devra indiquer les personnes autorisées à utiliser la marque, les caractéristiques que certifie la marque, la manière dont l’organisme de certification vérifie ces caractéristiques et surveille l’usage de la marque, les conditions d’usage de la marque et les sanctions.
A noter l’absence de l’exigence d’accréditation des organismes certificateurs. Le considérant 27 se contente d’énoncer que « Les marques de certification permettront à un institut ou un organisme de certification d’autoriser les adhérents au système de certification à utiliser la marque en tant que signe pour des produits ou services satisfaisant aux critères de certification ». A défaut d’harmonisation des règles de certification, le consommateur risque d’être induit en erreur sur le produit ou le service que désigne la marque étant donné que les règles d’un Etat à l’autre ne sont pas les mêmes.
Il reste à noter que le Règlement UE 2015/2424 ferme expressément l’accès des marques de certification aux indications géographiques alors que paradoxalement la Directive 2015/2436 laisse le choix aux Etats membres d’autoriser ou non la marque de certification qui désigne la provenance géographique d’un produit ou service.
Il convient de rappeler que la France, pionnière dans la défense des indications géographiques, de par son riche patrimoine culturel, a été l’initiatrice de plusieurs régimes de protection dédiés à la défense des indications géographiques (notamment les appellations d’origine et les indications de provenance) dont la Communauté européenne s’est inspirée pour créer les Appellations d’Origine Protégées (AOP) et les Indications Géographiques Protégées (IGP).
Encore récemment, la loi Hamon a introduit en droit français « les indications géographiques protégeant les produits industriels et artisanaux » (IGPIA) alors que l’Union européenne étudie en ce moment l’instauration d’un système européen unique de protection des indications géographiques pour les produits non agricoles, ce qui est une nouvelle preuve que la France demeure un précurseur dans la protection de l’origine des produits…
Caroline JOUVEN (cjouven@inlex.com) et Iris LE GALL