Pourquoi un sportif protégerait son geste ou son expression ? Est-ce une question de business ? Ou juste une protection pour éviter d’utiliser leur geste à leur insu ?
Beaucoup de sportifs ont leurs marques de vêtement, de boissons ou même d’ustensile de cuisine. Le branding[1] chez les sportifs existe, et ce depuis longtemps.
En effet en 1933, un certain tennisman du nom de René Lacoste est le premier à créer sa marque de vêtement, aujourd’hui mondialement célèbre.
Les exemples sont nombreux : CVNDSH marque d’accessoire de vélo crée par Mark Cavendish (cycliste), SODA SHAQ marque de soda crée par Shaquille O’ Neal (basketteur), ou même la marque patronymique George Foreman créateur de grill et plancha de table (boxer)…
Il n’est plus surprenant que les célébrités se présentent en tant que marque déposée. Leur voix, leur visage, leur simple présence.
D’ailleurs, le célèbre attaquant suédois du PSG Zlatan Ibrahimovic a déposé le nom Zlatan en tant que marque dès 2003. Malheureusement pour lui, il a été moins rapide à s’offrir le nom de domaine Zlatan.fr, ce qu’un de ses fans s’est empressé de faire.
Rien d’étonnant donc à ce que les célébrités déposent comme marque déposée les choses les plus étranges en rapport avec elles. De cette manière, elles évitent que quelqu’un d’autre s’approprie de l’argent qui devrait leur revenir…
En effet Michael Jordan, a été lui-même victime de ce genre de méfait.
Un fabricant chinois de vêtements sportifs a utilisé son nom sans autorisation, Michael Jordan est reconnu dans le monde entier comme le meilleur joueur de l’histoire de son sport. Le légendaire numéro 23 des Chicago Bulls est ainsi connu en Chine depuis plus de 30 ans sous le nom de « Qiaodan », traduction de Jordan.
Un fabricant de vêtements sportifs avait donc sauté sur l’occasion pour utiliser cette réputation à des fins commerciales il y a quelques années, en se nommant « Qiaodan Sports ».
Mais cela ne s’arrête pas là. Cette entreprise, dont les produits sont distribués dans plus de 5700 magasins dans le l’Empire du soleil levant, utilise également son numéro historique, le 23, un logo très proche de celui de la marque Air Jordan et a même déposé des transpositions littérales de noms de ses fils, Marcus et Jeffrey.
Michael Jordan avait ainsi déposé plainte, et avait demandé 1,4 million de yuans, soit 173.400 euros, de dommages et intérêts, argent qu’il avait promis de reverser «au basketball en Chine».
“Il est profondément décevant de voir une société faire des affaires en utilisant sans ma permission mon nom, mon numéro 23 et même les noms de mes enfants”, avait déclaré Michael Jordan dans un communiqué. “Il ne s’agit pas d’argent, il s’agit de principe et de protéger mon nom.”
A gauche le logo « air Jordan »
A droite le logo « qiaodan »
Les différents logos utilisé par « qiaodan »
Dans la foulée de ce procès, l’entreprise chinoise avait décidé de porter plainte à son tour contre Jordan pour atteinte à leur réputation, lui réclamant une compensation de 8 millions de… dollars.
Cependant, à la surprise générale, le tribunal chinois a donné raison, au mois de mai dernier, au fabricant de vêtements, les autorisant à utiliser le nom, et le numéro de l’américain. Fidèle à son esprit de compétition légendaire, et sous les conseils de ses avocats, Jordan ne s’avoue pas vaincu et a donc décidé de saisir la Cour Suprême, plus haute juridiction chinoise, dont on attend désormais le verdict.
Même les slogans les plus anodins ont une valeur !
Les fédérations sportives l’ont appris à leurs dépens, puisqu’elles viennent de récupérer la marque “Allez les bleus”…17 ans après se l’être fait soufflée par un particulier opportuniste.
L’histoire remonte en fait à 1977 quand la Seita, propriétaire des cigarettes Gitanes, se lance dans la Formule 1. L’écurie française Ligier se pare alors du bleu de son nouveau sponsor. Or son principal adversaire se nomme McLaren, dont les bolides rouges et blancs portent les couleurs de Marlboro. Mêlant esprit patriotique et marketing, la Seita décide donc de s’approprier le slogan “Allez les bleus” et le dépose auprès de l’Institut national de la propriété intellectuelle.
La licence, accordée pour 10 ans, est renouvelée une fois par le cigarettier. Mais il l’abandonne en 1997, la loi Evin (qui interdit la publicité pour le tabac) étant passée par là.
C’est à ce moment-là qu’un particulier de la région lyonnaise, flairant le bon coup à quelques mois de la Coupe du monde de football en France, il dépose à son tour la marque auprès de l’Inpi. Désormais, tous les produits estampillés “Allez les bleus” (écharpes, ballons, sacs, etc.) doivent faire l’objet d’un consentement de sa part, moyennant rémunération. Ses clients sont donc des grandes entreprises. Et les contrats peuvent atteindre plusieurs centaines de milliers d’euros.
En 2001, la Fédération française de football, désireuse de récupérer le filon, l’attaque en justice. Cette dernière est pourtant déboutée par le tribunal de grande instance de Paris, une décision confirmée en appel puis en cassation.
Mais la puissante FFF ne compte pas en rester là. En 2009, le Comité national olympique et sportif français (qui représente les fédérations auprès des pouvoirs publics) lance une nouvelle procédure contre ce particulier. Cette fois-ci victorieuse. “Ce monsieur n’avait rien à voir avec le sport. Il avait subtilisé le slogan des supporters”, se félicite ainsi, l’avocate du CNOSF.
L’histoire aura finalement duré 17 ans. Et les revenus issus de la marque “Allez les bleus” seront désormais versés aux fédérations.
Des histoires tout autant réelles que rocambolesques, mais qui nous laissent le droit de nous poser la question suivante :
- doit-on systématiquement déposer un geste ou un slogan ?
La réponse est, si vous êtes célèbre, protégez-vous ! Avant qu’un opportuniste développe une marque a votre insu.
Angers SCO, équipe promue en ligue 1 cette année est connue pour sa « Dalle Angevine », marque qui est d’ailleurs déposée à l’INPI.
Mais comment un slogan si anodin est maintenant protégé ?
Comme me le disait Olivier AURIAC capitaine de l’équipe d’Angers SCO, le mot la « Dalle » est assez commun dans le Sud-Ouest, donc a priori un mot familier utilisé par tout le monde.
Cependant lors d’un match compliqué en Corse en septembre 2012 contre le GFC, Angers SCO gagne 1-0 en faisant ainsi une grosse performance en Corse. C’est dans ce moment d’euphorie qu’Olivier Auriac crie « on a la Dalle, la Dalle Angevine ! ».
Ils communiquent lui et ses coéquipiers sur les réseaux sociaux avec le « #ladalleangevine ». Ce qui a fait un buzz énorme dans la ville ainsi que sur les réseaux. Les Angevins sont connus pour marquer des buts dans les dernières minutes. Ce qui fut d’autant plus vrais sur la saison 2013/2014 car Angers prend 11 points dans les arrêts de jeu. « La Dalle angevine » se propage à une vitesse incroyable au point d’entendre des chants et même voir une banderole sur ce slogan.
En avril 2013 lors d’une interview sur Eurosport la présentatrice Carine GALLY demande une explication sur la « Dalle Angevine » c’est alors qu’Olivier AURIAC à l’aide de son entourage prend conscience qu’il faut protéger ce slogan, qu’il déposera à l’INPI quelques jours plus tard.
Dépôt qu’il a bien fait de faire car quelques mois plus tard un boulanger sort une baguette « la dalle angevine » et lui a donc fait remarquer poliment qu’il ne pouvait pas exploiter cette marque car il avait pris le soin de la déposer à l’INPI.
La dalle Angevine ne s’arrête pas là car on l’entend chez les Ducs d’Angers (hockey sur glace) au SCO rugby etc… . Le virus est en train de se propager à d’autres sports angevins, et qui sait peut-être qu’Angers ne sera plus connu que par sa douceur Angevine mais aussi par sa Dalle Angevine.
Merci à Olivier AURIAC pour le temps qu’il m’a accordé lors de cette interview. Merci à Anatole pour ces renseignements précis sur le SCO Angers.
Alexis GROYER, assistant Inlex IP Expertise Angers.
Pour plus d’information sur cliquez contacter Inlex en cliquant sur le lien suivant […]
Sources: bfmtv, slate.fr, creads.fr
[1] Le terme de branding désigne généralement une logique d’action marketing ou publicitaire qui cherche à positionner une marque dans l’esprit du consommateur.