Réforme du Paquet Marque – Volet 3 – Plein phare sur les libellés : le diable est dans le détail !

Quels sont les cas immédiatement concernés par ce volet de la réforme ?

  • J’utilise le même libellé de départ depuis des années
  • J’exploite une marque pour un seul produit
  • Mon portefeuille de marques contient beaucoup de marques non exploitées
  • Je renouvelle toujours mes marques de manière identique, sans réduire le nombre de classes.

Lors du dépôt de marque, le déposant profane aura probablement murement pensé son signe (choix du mot, logo) mais plus rarement son libellé, perçu comme une simple étape technique… Pourtant cette étape déterminera l’étendue de la protection de la marque. Ce point du « Paquet Marque » est donc loin d’être un développement administratif !

Avant le « Paquet Marque » : quel degré de précision dans la rédaction du libellé ?

Le silence de la directive de 2008 sur les libellés est rompu ! Le « Paquet Marque » consacre la voix de la jurisprudence IP Translator dans un article où la précision des libellés règne.

On le sait, avant l’arrêt IP Translator, la loi nationale de nombreux pays imposait déjà une rédaction précise des libellés de marque pour mieux déterminer l’étendue du monopole.

Par exemple, en France, la position de l’INPI a toujours été assez stricte. C’est le système du « libellé, rien que le libellé » : les produits entrant naturellement dans une catégorie générale sont d’emblée protégés, les autres doivent être précisés (par exemple, les pantalons sont inclus dans la catégorie des vêtements mais pas les chaussures).

En revanche, dans d’autres pays, la position des Offices était nettement plus souple : pas besoin de préciser chaque produit ou service, reprendre l’intitulé de classe suffit pour revendiquer le « package » (l’intitulé de classe était l’enveloppe incluant automatiquement tous les produits de cette classe). On trouvait alors une multitude de marques aux libellés génériques, incapables de refléter le périmètre réel de protection voulu par le déposant.

Pour mettre fin à ces divergences, la CJUE adopte une situation intermédiaire : C’est l’arrêt IP Translator.

Il est toujours possible d’utiliser les intitulés de classe à condition qu’ils soient suffisamment clairs et précis. De plus, ils ne donnent plus automatiquement droit à la protection de tous les produits et services de cette classe. Le déposant est obligé de préciser les produits particuliers pour lesquels il veut être protégé et, s’il veut revendiquer la totalité des produits d’une classe, il peut simplement cocher une case prévue à cet effet.

Le « Paquet marque » s’inscrit dans la lignée de l’arrêt IP Translator et de la position de l’INPI. Le libellé doit désormais être rédigé avec une précision et clarté telles qu’en lisant le libellé d’une marque, toute personne devrait être en mesure de connaître l’activité pour laquelle la marque est déposée.

La réforme du « Paquet Marque » et ses répercussions sur la politique de dépôt de marque

Parmi les apports de la réforme, l’exigence de précision des libellés entraîne deux impacts directs sur la politique de dépôt de marques et plus particulièrement sur le contenu des libellés.

  • Les nouveaux dépôts : travailler la rédaction des libellés, une priorité !

La nouveauté : Instaurée par l’article 39, l’obligation de clarté et de précision du libellé devient une condition à l’enregistrement de la marque. Lorsque le déposant ne proposera pas de formulation acceptable dans le délai fixé, les Offices rejetteront toute demande dont les termes manquent de clarté ou sont imprécis.

Son incidence : Pas de panique, on pourra toujours avoir recours aux termes généraux dans les libellés ! La condition ? Satisfaire aux exigences de clarté et de précision. Concrètement ? En l’absence de guidelines de l’OHMI et de l’INPI, il est pour le moment difficile de prévoir avec quel degré de précision devront désormais être rédigés les libellés.

 

Mais tout laisse à penser que cette exigence de précision du « Paquet Marque » va entraîner une multiplication des notifications de forme. Et compte tenu de la tendance actuelle à la simplification des procédures administratives, il y a fort à parier que les notifications ne contiendront plus de propositions de formulation… Pourtant ces propositions faites par les examinateurs seraient les meilleurs indicateurs du degré de précision attendu par les Offices !

 

Dans tous les cas, une évidence s’impose : travailler la rédaction des libellés en amont du dépôt devient primordial si l’on veut éviter de multiplier les notifications de forme mais également afin de bien délimiter le territoire de la marque déposée.

  • Quel comportement vis-à-vis des marques existantes ?

Le « Paquet Marque » va bien évidement modifier nos réflexes en matière de rédaction des libellés pour les nouveaux dépôts mais pour les marques déjà existantes, il est essentiel de se demander si leurs libellés sont suffisamment précis.

La question de préciser le libellé, sans attendre l’échéance de renouvellement de la marque, va forcément se poser rapidement et notamment si :

  • Depuis le dépôt de la marque, l’activité s’est développée. Par exemple, une marque est déposée pour des services de divertissement. Forte de son succès, l’activité initiale des jeux télévisés s’est développée en parallèle vers les jeux en ligne. Dans ce cas, faudra-t-il modifier le libellé par « services de divertissement, à savoir jeux télévisés, jeux en ligne » ?

 

  • La marque est la base d’un contentieux : la précision du libellé, une priorité ! En effet, la jurisprudence peut en témoigner, si le libellé est jugé trop vague, le juge ne fait pas dans la demie mesure et considère que la marque ne couvre pas l’activité du tout…

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Si vous faites partis des cas concernés, les équipes d’INLEX sont à votre entière disposition pour évaluer votre niveau de risque et vous conseiller sur les démarches à mettre en œuvre pour préserver vos droits de marques et vous accompagner à maintenir et valoriser votre patrimoine immatériel.

 

Hugues PAYEN