Deux fois plus de droits, deux fois moins de moyens

Un arrêt du Tribunal de Grande Instance de Paris du 26 octobre dernier, dans le domaine très concurrentiel de la téléphonie, a attiré notre attention : Bouygues Telecom, titulaire de 2 marques « FORFAIT 100% » déposée en février 2003 et « DEUX FOIS PLUS » déposée en mai 2002 ; note le dépôt en février 2007 par SFR de la marque « SFR 100% », contre laquelle elle forme opposition devant l’INPI, puis le lancement en mai 2007 d’une campagne de publicité de SFR destinée à promouvoir un service intitulé FORFAIT SFR 100% , et reprenant le slogan DEUX FOIS PLUS DE TEMPS.

Les juges du fond ont retenu la validité des deux marques de Bouygues, contestées par SFR pour manque de caractère distinctif. Toutefois, ils ont considéré dans le premier cas que l’usage de FORFAIT SFR 100% ne portait pas à confusion vis-à -vis de la marque « FORFAIT 100% », dans la mesure où « le sigle SFR constitue l’élément distinctif déterminant des signes examinés ».

En outre, le Tribunal a estimé que l’emploi de l’expression DEUX FOIS PLUS DE TEMPS par SFR en 2007 ne pouvait lui être reproché, dans la mesure où « elle s’était bornée à faire usage d’une locution courante en matière publicitaire », et qu’elle proposait, dès 1999 à ses abonnés de téléphoner « 2 fois plus ». Toujours en se basant sur les documents fournis par SFR depuis 1999, les juges ont été jusqu’à annuler pour fraude la marque de Bouygues « DEUX FOIS PLUS ». Cet arrêt semble donc bien victime de lui-même, donnant d’une main ce qu’il prenait de l’autre :D’une part les juges ont admis la validité de la marques FORFAIT 100 % de Bouygues comme non nécessaires pour désigner les produits ou services visés, ce qui au regard de la jurisprudence communautaire actuelle, est une position très ouverte “ mais ne peuvent reconnaître que la reproduction à l’identique de celle-ci, à laquelle est adjointe le sigle SFR constitue une contrefaçon.

On est en droit de se demander dès lors ce qui pourrait constituer une contrefaçon de cette marque ! D’autre part, tout en reconnaissant la validité de la marque DEUX FOIS PLUS, le Tribunal admet que la reproduction de celle ci dans l’expression DEUX FOIS PLUS DE TEMPS n’est pas fautive, dans la mesure o๠SFR utilisait déjà cette expression antérieurement. Enfin, la reconnaissance de la fraude dans ce cas pousse à s’interroger sur l’étendue des recherches d’usage qu’il faudrait mener avant tout dépôt, puisque celui-ci semble bien de nature à créer une antériorité à la lumière de cette décision.

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