La CJCE statue pour la 1ère fois sur Google AdWords !

La décision tant attendue a finalement été rendue le 23 mars dernier. L’arrêt de la CJCE concerne trois affaires jointes soumises par notre Cour de Cassation (Louis Vuitton Malletier SA c./ Google France SARL et Google Inc, Viatecum SA et Luteciel SARL c./ Google France SARL et CNRRH et autres c./ Google France SARL).

Dans ces affaires, des titulaires de marques avaient assigné Google parce que l’introduction de leurs marques dans le moteur de recherche déclenchait l’apparition de liens soit vers des sites offrant des faux (affaire Vuitton) soit vers des sites de concurrents, tous apparaissant sous la bannière « liens sponsorisés ».

En France, le Tribunal puis la Court d’Appel avaient retenu la contrefaçon de marque à l’encontre de Google (ainsi qu’à l’encontre de l’un des concurrents des plaignants qui avait également été assigné dans l’une des trois affaires). La Cour de Cassation décida de surseoir à statuer en Mai 2008 pour s’en remettre à l’avis de la CJCE.

Selon la CJCE, le système AdWords de Google n’est contraire à aucune des dispositions Communautaires du droit des marques. La Cour considère que le stockage comme mots-clés de signes identiques à des marques ne constitue pas un « usage dans la vie des affaires » qui est une condition préalable pour qu’il y ait atteinte à la marque.

Google intervient pour la CJCE tout au plus dans la « vie des affaires » mais ne fait pas lui-même directement usage des signes. L’activité commercial et l’avantage économique qu’il peut en retirer est à ce titre sans incidence pour la Cour et ne permet pas davantage de retenir qu’il y a un usage des signes effectué par Google.

La CJCE admet toutefois que Google pourrait être considéré comme un hébergeur afin de se placer sous le régime de responsabilité allégé découlant de la Directive 2000/31. Cette analyse est toutefois laissée par la Cour aux juridictions nationales qui devront analyser au cas par cas si Google joue ou non un rôle actif à l’égard des données ainsi stockées.

En ce qui concerne les annonceurs (= ceux ayant réservé les mots clés), les titulaires de marques sont en mesure de leur interdire les annonces portant sur des produits ou services identiques à ceux couverts par leur marque et déclenchées par le choix du mot-clé identique à leur marque qui a été choisi sans leur consentement. Cette capacité à agir est toutefois limitée par la Cour aux cas où les annonces ne permettent pas ou permettent difficilement à l’internaute moyen de savoir si les produits ou services visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d’un tiers.

Cette décision pourra paraitre “frustrante” ou “irrationnelle” pour certains. Après la saga Google qui a agité les juridictions françaises depuis plusieurs années, elle annonce en tout cas une prochaine saga au niveau des juridictions communautaires. Il est fort à parier que les titulaires de marques n’en resteront en effet pas là vis-à-vis de Google.

On note déjà que cette première décision fait de « l’identité » (des signes et des produits ou services) un maître-mot. La question de la « similarité » (des signes et/ou des produits ou services) reste donc entière.

Un nouveau personnage fait également son entrée avec cet « internaute moyen » qui offre une certain marge d’appréciation quant aux difficultés qu’il est susceptible de rencontrer pour identifier ou non l’origine des produits ou services en cause.

L’approche de la CJCE impose déjà une révision des stratégies de marque et notamment des surveillances et démarches à adopter. A suivre donc ….

 

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