La notoriété d’Alain Ducasse et de l’hôtel Martinez

Comme le prévoit la loi, un nom patronymique peut constituer une marque. En vertu de cette possibilité et au regard du projet de commercialisation d’une ligne ALAIN DUCASSE, la société ALAIN DUCASSE DIFFUSION constituée par Alain DUCASSE et deux autres associés, a donc procédé au dépôt à titre de marques, du célèbre patronyme. Le Chef étoilé a alors assigné cette société en nullité des dépôts effectués en fraude de ses droits.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence saisie de cette affaire, rejette alors la demande de M. DUCASSE en se fondant sur la décision de principe « BORDAS » rendue en 1985 par la Cour de Cassation ; les juges d’appel relevant que Alain DUCASSE aurait perdu l’usage commercial de son nom qui était devenu par l’insertion dans les statuts de la société, un signe distinctif détaché de la personne physique en question pour s’appliquer à la personne morale qu’il distingue et devenir ainsi un élément de propriété incorporelle.

La Cour de Cassation casse alors l’arrêt rendu par la Cour d’Appel en relevant que Alain DUCASSE n’avait pas renoncé à l’exercice de ses droits patrimoniaux sur son nom ; selon la Haute Juridiction, le consentement donné par un associé fondateur, dont le nom est notoirement connu, à l’insertion de son patronyme dans la dénomination d’une société exerçant son activité dans le même domaine ne saurait, sans accord de sa part et en l’absence de renonciation expresse ou tacite à ses droits patrimoniaux, autoriser la société à déposer ce patronyme à titre de marque pour désigner les mêmes produits ou services.

En définitive, si Alain DUCASSE a ici pu voir annuler les dépôts de marques ALAIN DUCASSE, c’est en raison de l’acquisition de la notoriété de son nom patronymique avant même que la société n’ait été créée et les marques en cause n’aient été déposées.

Par conséquent, les dépôts de marques effectués au nom de la société ALAIN DUCASSE DIFFUSION auraient été considérés comme valables, si c’était au travers de l’activité de cette dernière que le nom était devenu un signe renommé.

C’est d’ailleurs ce qu’a décidé la Cour de Cassation dans un arrêt rendu le 29 janvier 2008 ; dans cette affaire une des héritières d’Emmanuel MARTINEZ dénommée Suzanne MARTINEZ, conteste l’usage des marques RELAIS MARTINEZ et HOTEL MARTINEZ pour désigner des services d’hôtellerie et de restauration. La Haute Juridiction s’appuyant sur le fait que le sigle MARTINEZ était notoirement connu au moment du dépôt de ces marques non pas au regard du patronyme d’Emmanuel MARTINEZ mais en raison de l’exploitation qui a été faite depuis de nombreuses années de la dénomination HOTEL MARTINEZ, approuve les juges d’appel de ne pas avoir annulé les marques RELAIS MARTINEZ et HOTEL MARTINEZ.

Ces arrêts démontrent s’il en était besoin, l’importance du dépôt à titre de marque, de son nom patronymique et ce, en amont du commencement de l’activité qui sera exercée sous ce nom.

Par ailleurs, il est vivement conseillé de procéder à de tels dépôts non pas au nom d’une société mais au nom de la personne intéressée ; en effet, en cas de dissolution de la société ou de transmission, le « fondateur » ayant déposé son nom patronymique à titre de marque, pourrait se voir dans l’impossibilité de l’utiliser dans la vie des affaires.

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