Le Droit Chinois sur les Marques : Plaidoyer pour une réhabilitation avec la nouvelle loi du 30 Août 2013 !

Nous entendons tous très souvent des affirmations selon lesquelles le droit chinois sur les marques serait protectionniste (y compris des contrefacteurs), statique, illisible et injuste.

Quel regard objectif peut-on porter sur le système chinois ?

D’abord, le système est fondé sur un rôle actif et véritable de l’Office des Marques. Peut-on s’en plaindre ? la réponse est loin d’être catégorique et négative.

Pour rappel, le droit chinois des marques prévoit la possibilité pour l’administration chinoise de citer des antériorités à l’encontre d’un dépôt postérieur qu’elle jugerait confusant. Les propriétaires de la marque antérieure sont donc protégés sans avoir nécessairement l’obligation de réagir (et donc de faire des frais).

Par comparaison, si quelqu’un dépose la marque notoire Cartier pour des bijoux, en France ou à l’OHMI, l’Office percevra les taxes de dépôt et enregistrera la marque sauf si Cartier, informé dudit dépôt (généralement dans le cadre d’une surveillance effectuée à ses frais), fait opposition (ce qui suppose le paiement de taxes officielles).

L’on voit donc bien que, pour un cas semblable, le propriétaire d’une marque légitime paye une seule taxe de dépôt en Chine alors que, dans un pays de l’Union Européenne, il paiera une taxe de dépôt, des frais de surveillance et une taxe d’opposition. Les Offices européens ont donc, en quelque sorte, « externalisé l’activité de surveillance des registres et touchent deux fois plus de taxes…

Quelles sont ici les limites du système chinois (car aucun système n’est, hélas, parfait) : d’une part, des citations d’antériorités limitées le plus souvent à l’identique ou au quasi-identique et, d’autre part, des citations qui semblent parfois être faites plus volontiers en faveur de propriétaires chinois qu’étrangers.

Les chinois ne sont pas, non plus, sourds comme on voudrait le croire et leur système évolue petit à petit. Les ajustements auxquels ils procèdent sont généralement (probablement) murement réfléchis, quand on pense au nombre de marques déposées chaque année dans ce qui est maintenant la première économie mondiale.

La Nouvelle Loi sur les marques du 30 août 2013 (entrant en vigueur au 1 mai 2014) participe de cette évolution qu’il faut saluer !

Qu’y a-t-il de notable par rapport aux difficultés que nous avons rencontrées ces dernières années ?

  • Un cadre plus précis pour les procédures (concernant les marques notoires, les délais d’examen des dossiers, les procédures d’invalidation, etc.) qui lie l’administration, ce qui est un gage de traitement unifié pour tous les déposants qu’ils soient chinois ou étrangers
  • Un système qui cherche à empêcher les actions dilatoires (notamment celles qui n’ont d’autre objectif que de bloquer artificiellement le processus d’enregistrement d’une marque, blocage important lorsque l’on sait que les actions en contrefaçon ne peuvent être initiées que par le propriétaire d’une marque enregistrée)
  • Une protection du consommateur contre les marques qui s’autoproclament « notoires » (visiblement le problème doit être fréquent…)
  • Un système en voie de modernisation (e-filing plus efficace, dépôt multi-classes pour limiter les coûts)

Au final, l’on voit bien que le système chinois évolue et qu’il est très important d’en suivre les changements non seulement pour respecter les nouvelles règles mais aussi (et surtout) pour comprendre l’esprit qui préside à leur adoption.

 

Anne-Laure SELLIER – Juriste en Propriété Intellectuelle

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